Qu’est-ce qu’un sirop d’érable d’exception ?  Comment en fabrique-t-on ? À quoi le reconnait-on ?

Qu’est-ce qu’un sirop d’érable d’exception ? Comment en fabrique-t-on ? À quoi le reconnait-on ?

Demander à un producteur ou une productrice acéricole comment il ou elle confectionne son sirop d’érable et vous aurez autant de réponses que de sucriers. Et tous vous diront qu’ils ont le meilleur sirop au monde. Le Québec produit plus de 70% de tout le sirop d'érable au monde.

L'influence du terroir 

En 2005, lorsque nous avons acheté l'érablière où se trouve la Ferme du Loup à Saint-Paulin en Mauricie, les gens du coin nous ont dit à plusieurs reprises que le sirop produit à cet endroit était le meilleur qu'ils avaient jamais goûté. Nous avons des clients qui viennent faire leurs provisions à chaque année depuis le milieu des années 80 !  

Une dame du village m'a mis au défi de lui apporter un pot de tire d'érable comme celui qu'elle mangeait dans sa jeunesse. Elle n'en revenait pas. Notre petit pot de tire l'a ramenée dans le passé. C'était exactement les saveurs de ses souvenirs. 

Il existe plusieurs espèces d'érables qui peuvent être entaillées pour récolter la sève. Selon la composition de la forêt, le résultat final en sera influencé. Par exemple, l'érable rouge donne un goût de bonbon caramel toffee qui, bien qu'intéressant, peut masquer la saveur caractéristique de l'érable s'il est trop cuit. L'érable à sucre, celui que l'on préfère, a une croissance lente et se laisse facilement envahir par d'autres espèces.  

La saveur caractéristique de l'érable se développe lors du processus d'évaporation sous l'effet de la chaleur et est attribuée à certains acides aminés.  

Le terroir influence-t-il la qualité du sirop d'érable ?

L'érable à sucre est rarement retrouvé en peuplement homogène, mais plutôt en compétition avec de nombreuses autres espèces. Il est une espèce tolérante à l'ombre et les jeunes semis peuvent survivre sous un couvert forestier. 

Le sol, la région, l’exposition de la forêt au soleil sont des facteurs qui influencent le goût du sirop d’érable.  

Notre érablière est située au début de la chaîne des Laurentides du Québec, exposée plein-sud sur une terre de roches. Notre climat est plutôt froid et nous avons un important couvert de neige. Les érables à sucre dominent et plusieurs sont centenaires. Tous ses facteurs contribuent à donner un goût caractéristique à nos produits. 

Quel rôle joue les saisons dans la fabrication du sirop d'érable ?

Un de nos sirops d’érable préféré est celui de la récolte d’hiver. C’est la première récolte, alors que le thermomètre atteint encore la nuit les -20 degrés. La première coulée contient généralement peu de microorganismes. 

Plus la saison avance, plus les microorganismes s’installent dans le réseau de collecte de l’eau d’érable. À la fin de la saison, on peut atteindre jusqu'à 10 millions de microorganismes par millilitre d'eau.  

Jusqu'à un certain niveau, ces microorganismes contribuent à l’amélioration de la saveur du nectar obtenu.

Selon Anne-Marie Desbiens citée par Radio-Canada, il faut compter environ 1 million de microorganismes pour atteindre les flaveurs caractéristiques de l'érable. Certains de nos clients ne jurent que par le sirop foncé. Celui que nous produisons est sélectionné pour son équilibre entre le goût bien caractérisé de notre terroir et des notes de torréfaction. 

Comment les équipements contribuent-ils au bon goût du sirop d'érable ?

Quand nous étions jeunes, nous allions à la cabane à sucre de différents amis ou connaissances de mes parents. À tous les ans, une automobile restait prise dans le chemin de boue qui reliait la route à la cabane. Jamais la même cabane, jamais la même voiture. 

Il y avait des centaines de chaudières accrochées aux arbres et tous les enfants y buvaient l’eau récoltées. À l’intérieur, il y avait toujours un vieux monsieur pour nous éloigner de cette grosse bouilloire qui dégageait cette odeur caractéristique du vrai bon sirop d’érable. 

Au cours des dernières années, le portrait des sucriers a bien changé. La recherche et la technologie ont permis d’augmenter la productivité et le rendement de la forêt. 

Au Québec, la récolte du sirop d’érable demeure une activité artisanale. Aucun robot ne peut chausser des raquettes, marcher dans la neige pour entailler et détailler les arbres. Les érablières sont des écosystèmes naturels qui requièrent des interventions afin de les protéger. 

Cependant, la technologie permet aujourd’hui d’automatiser de nombreuses opérations qui se faisaient autrefois à la main. Les réseaux de collecte de la sève sont maintenant reliés par internet et permettent d’identifier les bris et chutes d’arbres sur le réseau par exemple. 

La collecte simplifiée et accélérée permet de transformer plus rapidement la sève des érables et d’en assurer une innocuité excellente. Les nouvelles bouilloires utilisées, de même que les systèmes d’osmoses réduisent le temps requis pour l’évaporation de la sève.  

En résulte également une amélioration de la qualité du produit final grâce à des méthodes de production plus précises et contrôlées, des équipements de meilleure qualité, de même que de la formation offerte aux acériculteurs. 

Par exemple, les producteurs et productrices acéricoles du Québec ont investi beaucoup d’argent afin de se conformer à la norme californienne concernant le plomb dans les aliments. Elle est considérée comme l’une des plus strictes au monde et vise à protéger la santé des consommateurs en réduisant leur exposition au plomb. Les anciens équipements servant à la fabrication du sirop d’érable contenaient du plomb.  

Plomb ou pas, on ne peut ignorer les coûts élevés d'acquisition et d'entretien de ces nouvelles technologies. La dépendance accrue à la technologie peut rendre aussi les acériculteurs vulnérables aux pannes ou à leurs fournisseurs. 

Les petits lots et la méthode artisanale de fabrication du sirop d'érable d'exception

Une des principales critiques à laquelle nous sommes sensibles réside dans la perte de l'expérience humaine, du terroir et du savoir-faire artisanal vis-à-vis ces nouvelles technologies dans la production du sirop d'érable.  

Pour produire un sirop exceptionnel, nous croyons qu'il est important d'évaporer la sève tous les jours et le plus rapidement possible. Cela se traduit par une meilleure typicité de chaque lot afin de les distinguer par la suite.

Ce mode de production permet de mieux valoriser les particularités du terroir et des saisons et de faire reconnaitre notre produit selon les différents goûts de notre clientèle. 

La production en petit lot nous rapproche des méthodes traditionnelles tout en bénéficiant des connaissances et savoir-faire actualisés. 

Il est important de souligner que la production en petit lot est liée à des coûts de production plus élevés, qui nécessite une main-d'œuvre plus importante et qualifiée. 

Ce qui nous amène au prochain point. 

La motivation  

Vous voulez faire du sirop d’érable d’exception ? Rigueur, processus et contrôle sont les trois piliers qui s’ajoutent aux autres éléments. Nous avons suivi à la lettre ces trois éléments lorsque nous avons obtenu une médaille d’Or de la Commanderie de l’érable en 2021.  

Sans la motivation, impossible d’y arriver. Il est facile de tourner les coins ronds et de se dire que le terroir fera tout ou de compter sur des équipements derniers cris, de remettre à demain le nettoyage des cuves, même s’il est 2 heures le matin, que vous y êtes depuis 6 heures l’autre matin et que vous n’aurez que quelques heures de sommeil avant la prochaine coulée.  

Le métier d’acériculteur est difficile, la préparation se fait sur une année complète et la récolte ne dure que quelques semaines. Le sirop d’érable est un produit unique au monde, bon et naturel. Pour qu’il soit exceptionnel, aucun doute qu’il faille de la passion. 

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